Nous avons 7 ans toi et moi

Il y a exactement 7 ans, mes cheveux étaient longs, beaux et forts.
Mes pieds étaient knackis, mes fesses marmelade, la taille de  mes seins immensurable.
Tu prenais déjà une place si énorme dans mon corps que je me demandais s’il allait reprendre ses droits un jour, jour que je voyais fort fort lointain, peut -être au pays de Shrek.
Je me soûlais au jus d’orange en imaginant que c’était de la vodka, appréhendant le cataclysme qui tôt ou tard allait arriver dans ma vie.
12 heures de souffrance en silence et quelques poussées ont suffi pour que cette petite boule de 4500 grammes vienne changer ma vie par cette belle journée de fin avril.
À tout jamais.
Je ne t’ai pas tout de suite aimé comme tu le méritais, je le conçois.
Tu venais me voler ma place, tu étais la raison pour laquelle ton père était avec moi.
Pour lui je n’étais qu’un ventre qui couvait son trésor, son précieux, la prolongation de cette personnalité narcissique et égocentrique.
Tu étais pourtant un petit garçon que beaucoup de nouvelles mamans aimeraient avoir, sage comme une gravure de mode.
Je t’avais toi mais je le perdais, lui.
Je me suis longtemps sentie indigne de ne pas dédier tout l’amour d’une maman à son enfant.
Je crois bien que je t’ai même détesté parfois.
Tu m’as transformée en transparence, tu as fait de moi un fantôme, un accessoire dont on peut bien se passer, une pièce d’une collection qui n’est plus à la mode.
Je n’étais plus irremplaçable, tu étais plus important que moi.
Alors que la majorité des autres mamans consacraient toutes les minutes de leur vie, même celles qu’elles n’avaient pas, au fruit de leurs entrailles, je passais chaque minute à faire du sport alors que je venais d’accoucher, à me resculpter la silhouette, à partir à la recherche de ma féminité perdue, à m’affamer.
J’essayais en vain de sauver mon couple qui n’était plus depuis longtemps.
Je t’ai aimé en pointillés, ne sachant pas quoi faire, tiraillée entre ton amour bel et bien là, et ce mépris que je voulais aveuglement transformer en désir, mépris qui était le seul sentiment que ton père était dorénavant capable de m’offrir.
Mes nuits étaient longues et baignées de larmes et non plus de lumière.
Puis l’inévitable est arrivé comme une évidence, comme une page d’un livre écrite et vieillie depuis des années.
Ton père s’est séparé de moi, il a essayé de te séparer de moi également.
Il y est presque arrivé.
Il a failli transformer l’amour en haine, la bienveillance en indifférence, la joie en folie.
Les étapes qui s’en sont suivies furent éprouvantes et j’ai souvent cru que je n’y arriverai pas.
Que je n’arriverai pas à t’aimer.
Aujourd’hui tu apparais comme synonyme de gaieté dans mon dictionnaire.
Tu es un petit garçon dynamique, intelligent, sensible et vivant.
Tes mots pour me consoler quand tu me vois désemparée face à l’ado, tes gestes de tendresse quand tu me vois souffrir du dos, ta façon de me mettre de la crème ou de vouloir me coiffer, je ne les échangerais pour rien au monde.
Ta façon de comprendre les choses bien qu’on ne te les raconte pas tout le temps.
Ton intelligence émotionnelle qui te permet de faire la part de choses et nous aimer différemment, ton papa et moi.
Ta manière d’être heureux et de vivre cette vie que j’ai failli te voler, qui a presque mis fin à la mienne.

Ta façon de me dire que mes fesses sont quand même un peu grosses, mais que ça va encore.

Ton sourire.

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Aujourd’hui nous avons 7 ans, toi et moi.
Et ta place est bien là car j’ai enfin trouvé la mienne.

« Parce que tu m’aimes tout là-haut jusqu’au ciel »

Pardon pour tous ces « je t’aime » inaudibles, ces moments d’absence, ces coups de fil jamais passés, ce trop plein de larmes versées.

Le seul regret que j’éprouve aujourd’hui est de ne pas t’avoir choisi un autre père, mais il est trop tard et inutile de revenir sur ce « petit » détail.

Joyeux anniversaire ma petite tête de pastèque!


17 réflexions sur “Nous avons 7 ans toi et moi

  1. Toute en honnêteté et en pudeur, ce que tu écris là est magnifique. Le parcours d’une Maman qui se découvre de l’amour pour un enfant à travers des épreuves et des douleurs qui auraient pu vous détruire. Cela vous rend d’autant plus magnifiques ❤

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  2. « J’ai cru que je n’arriverais pas à t’aimer… »
    Et puis l’amour est là, qui attend, qui bouscule tout. Une déclaration tout en pudeur Cristina pour un évènement qui a bouleversé ta vie, à tant de niveaux. Je me suis reconnue dans certains de tes mots, c’est peut-être pour ça que j’ai frissonné à l’évocation de ces mois douloureux.
    Le résultat est splendide et ton fils comme toi aujourd’hui savez que ce lien qui vous unit est indestructible.
    Grosses bises, bonweekend et au plaisir de se voir à mon retour.

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